PRODAC : lorsque l’État mise sur la campagne

Le PRODAC est une initiative qui fait unanimement parler d’elle. En bien. Fait suffisamment rare pour titiller notre curiosité. Au-delà des louanges dithyrambiques enregistrées ici et là, nous avons entrepris d’en savoir davantage sur cette structure. Entretien avec Jean-Pierre Senghor, coordinateur du programme.

Publié le 3 janvier 2017   1 commentaire

Bonjour monsieur Senghor. Pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Jean-Pierre Senghor, je suis agronome de formation et je suis le coordonnateur national du Programme des domaines agricoles communautaires, le PRODAC.

Peut-on avoir des éclaircissements quant à ce programme ?

Le PRODAC se veut un des instruments majeurs de la stratégie de l’Etat pour promouvoir l’emploi en milieu rural par l’entrepreneuriat agricole. Véritables incubateurs d’entrepreneurs agricoles, les Domaines agricoles communautaires (DAC) sont, à ce titre, des pôles de compétitivité économique, lieux d’insertion de jeunes ruraux, de diplômés d’écoles de formation, mais également de promoteurs privés désireux d’investir le secteur aussi bien dans ses activités de production que dans celles de transformation et de services.

Ce modèle novateur se veut de contribuer à la réduction de la précarité sociale en milieu rural en y créant les conditions favorables à la génération massive d’emplois et de richesses.

Il s’agit, dans sa première phase quinquennale, de mettre à la disposition de ces entrepreneurs agricoles – les jeunes surtout – 30 000 hectares de terres aménagées réparties sur 10 terroirs à travers le pays.

Depuis sa création le 10 avril 2014 (décret 2014-498) et la mise en place de l’équipe de gestion du programme à partir d’août 2014, le programme a pu démarrer ses activités grâce au soutien exclusif de l’Etat qui a décidé d’agir, au titre de premier bailleur.

Le plan de mise en œuvre validé par le chef de l’Etat s’est fixé comme objectif premier le démarrage de quatre DAC au cours de 2014/2015 : Séfa (Sédhiou), Keur Samba Kane (Diourbel), Keur Momar Sarr (Louga) et Itato (Kédougou) ; ce à quoi nous nous sommes, dès lors attelés sans attendre, sous la supervision du ministre de la Jeunesse, de l’Emploi et de la Construction citoyenne.

Premières récoltes à Keur Momar Sarr

Quel est le constat qui a précédé et provoqué la naissance dudit programme ?

Le PRODAC est une réponse à la problématique de l’emploi. Un enjeu économique, social et politique que tous les pouvoirs publics cherchent à juguler. Il doit permettre de fixer les jeunes dans leur terroir et réduire la tentation à l’émigration clandestine.
Les gouvernants ont proposé des projets et programme pour lutter contre ce phénomène mondial.

Les financements de projets et la mise en place de fermes ont permis de faire face à cette demande croissante d’emplois. Les agences de formation et de financement tels que le FNPJ, l’ANEJ, l’AJEB ont fait leurs preuves. Toujours est-il que la formation nécessaire à l’employabilité a fait défaut. Ce à quoi nous tentons d’apporter des réponses concrètes en proposant un temps d’incubation entre douze et vingt-quatre mois.

Au Sénégal nous avons la chance d’avoir de vastes étendues de terre, de l’eau à profusion et une main d’œuvre sans cesse croissante (les jeunes). Ce programme permettra aux jeunes rester dans leur terroir et d’y gagner leur vie dignement. Mais aussi avec l’aménagement de ces régions, le Sénégal des profondeurs aura un visage nouveau qui réduit le déséquilibre entre milieu rural et le milieu urbain

Au-delà des vœux et mots, serait-il possible d’avoir une idée des résultats concrets enregistrés – c’est bien le cas de le dire – sur le terrain ?

Dès notre installation qui a coïncidé avec le démarrage de l’hivernage, nous nous sommes engagés malgré tout, dans la campagne agricole de 2014 en emblavant 1 000 ha de maïs au DAC de Séfa où 4000 tonnes de maïs ont été produites. Nous avons encadré plus de 674 producteurs impliqués en tant que tuteurs dans cette campagne. Pas moins de 1 591 jeunes s’étaient engagés dans les activités de production du maïs.

A l’arrivée ce n’est pas moins de 300 millions de francs qui sont injectés dans les familles en termes de revenus. C’est aussi la sécurité alimentaire dans tous les villages engagés dans le DAC (suppression totale de la soudure).

La campagne de 2014 a enregistré plus de 6 000 emplois temporaires depuis la préparation des sols jusqu’aux récoltes et commercialisation du maïs ; nous avions démarré au même moment, la réalisation de l’exploitation piscicole d’Itato (80 bassins et une écloserie moderne).

Exploitation piscicole d’Itato

En 2015, nous avons fait mieux avec 2 311 ha de maïs emblavés dans le cadre du programme hivernal au DAC de Séfa. Les bénéficiaires ont obtenus 9 244 tonnes de production de maïs. Nous avons varié avec une production de pastèques sur 117 ha emblavés à Keur Momar Sarr.

Au total, 468 Groupements d’entrepreneurs agricoles (GEA) dont 179 GEA actifs se sont impliqués dans le programme hivernal 2015. Cela nous a valu 9 910 emplois temporaires créés, à la fin de la campagne dont 1 949 emplois de soutien à l’activité de production agricoles. Cette campagne a rapporté 924 millions de FCFA de revenus distribués à l’issue de ce seul programme hivernal.

Concernant les infrastructures, le PRODAC a réalisé la plus grande exploitation piscicole du pays à Itato (Kédougou), avec une écloserie moderne d’une capacité de production de 3 millions d’alevins/an, permettant ainsi de produire 300 tonnes de poissons/an et de commercialiser 2 millions d’alevins/an. Plus de 15 tonnes de poissons sont récoltées entre avril et décembre janvier 2015.

A Séfa, c’est une station d’essai semences qui est mise en place et qui nous donne entière satisfaction déjà, en plus des 3 forages livrés pour permettre le démarrage la contre saison. Un plan d’aménagement sur 500 ha est en phase de réalisation.

Je dois rappeler que nous avons pu trouver un financement de 25 milliard pour les 4 premiers DAC (Séfa, Itato, Keur Momar Sarr et Keur Samba Kane avec Afrexime Bank auxquels s’ajoutent les 47 milliards de la Banque Islamique de Développement (BID) pour les DAC de Médina Yoro Foulah (Kolda), Niombato (région de Fatick), les Terres Neuves (Kaffrine) et Dodji (Louga)

Vous semblez être et passionné et doté de grandes convictions. Votre poste actuel comble-t-il ces versants de votre personnalité ?

Parfaitement ! Pour un tel programme, si vous n’êtes pas passionné, vous n’aimez pas les défis et vous n’êtes pas convaincu, vous n’avez pas votre place au PRODAC. Cette mutation et reconversion doivent se faire dans l’esprit des jeunes car avec l’agriculture on peut se réaliser chez soi.

Vous vous partagez entre séjours en ville et séjours à la fois en campagne et dans les campagnes. Vous définiriez vous comme un homme des champs ou un homme des villes ?

Jean-Pierre Senghor, coordonnateur national du PRODAC

Je suis un agent de développement au service de mon pays et je répondrai présent partout où le devoir m’appellera. Je rappelle qu’à 25 ans j’étais jeune ingénieur agronome, j’ai connu ma première affectation à Bakel où je suis resté deux ans et demi.
Les DAC sont aménagés à l’intérieur du pays, donc naturellement il me faut m’y rendre. C’est dire que je suis simplement un homme de terrain.


Voir en ligne : http://www.prodac.sn/

Irène Idrisse

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Lire 1 commentaire

  • Sénégal

    Je voudrais excercer au DAC de keur momar sarr que dois je faire

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